Le pape dialogue avec les jeunes place Saint-Pierre (1) Il aborde la question de la parole de Dieu et du mariage

ROME, Vendredi 7 avril 2006 (ZENIT.org) – En préparation à la XXIe Journée mondiale de la Jeunesse, le pape Benoît XVI a rencontré hier les jeunes de Rome et du Latium, place Saint-Pierre. Le pape a répondu aux questions de cinq jeunes. Les deux premières portaient sur la parole de Dieu, et sur l’affectivité et le mariage.

La rencontre s’est ouverte par un moment de fête et de témoignages. Après l’arrivée du pape, la Croix de l’Année Sainte de la Rédemption et l’icône de Marie « Salut du Peuple Romain » ont été placées sur le parvis de la basilique, et quelques passages de la première encyclique du pape, « Dieu est Amour » ont été lus (cf. Zenit, 6 avril)

Après la lecture de l’Evangile de Luc, un dialogue s’est instauré entre le pape et les jeunes.

 

Simon, 21 ans, étudiant, a demandé à Benoît XVI d’aider les jeunes à comprendre comment reconnaître le rôle de la Bible dans la vie de tous les jours. « Je me demande souvent, a-t-il dit, ce que ferait Jésus s’il se trouvait à ma place dans une situation déterminée, mais je ne réussis pas toujours à comprendre ce que me dit la Bible ».

Benoît XVI a répondu en soulignant trois points importants.

Le premier : « Il faut lire les Saintes Ecritures non pas comme un livre d’histoire… mais comme la parole de Dieu, c’est-à-dire en entrant dans un dialogue avec Dieu ».

Il faut lire la parole « en priant et en demandant à Dieu : ‘Aide-moi à comprendre ta parole’ », a expliqué le pape.

Le deuxième : « On ne peut pas lire les Saintes Ecritures, seul. Il est certes toujours important de lire la Bible de manière très personnelle, dans un dialogue personnel avec Dieu mais en même temps il est important de la lire en compagnie de personnes avec lesquelles on chemine, se laisser accompagner par les grands maîtres de la Lectio divina. Nous avons par exemple de nombreux beaux livres du cardinal Martini [archevêque émérite de Milan, ndlr], un vrai maître de la lectio divina ».

Le troisième : « Il est important de les lire avec la grande compagnie du peuple de Dieu, en marche, c’est-à-dire l’Eglise ».

Nous devons par conséquent lire les Ecritures « en entrant dans un dialogue personnel avec le Seigneur, accompagnés par des maîtres qui ont l’expérience de la foi… et avec la grande compagnie de l’Eglise », a conclu le pape.

Anna, 19 ans, étudiante en lettres, a reconnu devant le pape que dans le monde d’aujourd’hui il est difficile de vivre ce que propose l’Eglise, surtout dans le domaine de la morale sexuelle.

« L’amour aujourd’hui est souvent mal interprété, dans la mesure où il est présenté comme une expérience égoïste, alors qu’en réalité il s’agit d’un abandon de soi et qu’il permet ainsi de se trouver… une culture de la consommation falsifie notre vie avec un relativisme qui semble tout nous accorder et qui en réalité nous vide », a rappelé le pape.

« Pour moi c’est une chose très belle de constater que dans les toutes premières pages des Saintes Ecritures, juste après le récit de la Création de l’homme, nous trouvons la définition de l’amour et du mariage. L’auteur sacré dit : ‘L’homme abandonnera son père et sa mère, suivra sa femme et tous deux seront une seule chair, une existence unique’», a-t-il ajouté.

« Il s’agit d’une prophétie du mariage qui reste identique dans le Nouveau Testament également », a constaté le pape. Citant les théologiens du Moyen âge il a affirmé que dans un certain sens le mariage a été le premier sacrement car il fut institué par Dieu lors de la création. « C’est un sacrement inscrit dans l’être humain lui-même », a-t-il affirmé.

« Il ne s’agit donc pas d’une invention de l’Eglise », a poursuivi le pape, reconnaissant qu’à cause du péché originel et de la fragilité humaine, le mariage semble parfois réellement difficile à vivre.

C’est précisément pour cette raison, a expliqué le pape, que pour vivre cette vocation, nous avons besoin d’un « cœur nouveau », un « cœur de chair » comme le dit Ezéchiel. « Lors du baptême, le Seigneur nous implante ce cœur nouveau. Il ne s’agit pas d’une greffe physique, mais peut-être pouvons-nous nous servir de cette comparaison : après la greffe il est nécessaire que l’organisme reçoive des soins, qu’il bénéficie des médicaments nécessaires pour pouvoir vivre avec le nouveau cœur, pour que celui-ci devienne ‘son cœur’ et non ‘le cœur d’un autre’. Dans cette ‘greffe spirituelle’ dans laquelle le Seigneur nous implante un cœur nouveau, un cœur ouvert au Créateur, à la vocation de Dieu, des soins appropriés sont d’autant plus nécessaires pour pouvoir vivre avec ce cœur nouveau. Il faut avoir recours aux médicaments appropriés afin que ce cœur devienne vraiment ‘notre cœur’. En vivant ainsi dans la communion avec le Christ, avec son Eglise, le nouveau cœur devient réellement ‘notre cœur’ et le mariage devient possible. L’amour exclusif entre un homme et une femme, la vie à deux conforme au dessein du Créateur, devient possible, même si le climat de notre monde la rend si difficile, jusqu’à la faire apparaître impossible ».

« Il existe de nombreuses familles chrétiennes qui vivent dans la fidélité et dans la joie la vie et l’amour indiqués par le Créateur », a ajouté le pape.

De même que pour réussir dans le domaine du sport il faut de la discipline, suivre le Christ demande également des renoncements, a conclu le pape. Il ne s’agit pas d’une chose négative, a-t-il précisé. Ces choses « aident au contraire à vivre une vie vraiment humaine et heureuse. Puisqu’il existe une culture de la consommation qui veut nous empêcher de vivre selon le dessein du Créateur, nous devons avoir le courage de créer des îlots, des oasis, puis de grands terrains de culture catholique, où l’on puisse vivre le dessein du Créateur ». ZF06040702

Inelida, 17 ans, a demandé au pape ce qu’il attend des jeunes. Benoît XVI a invité à se demander plutôt ce que Dieu attend de nous.

« Nous nous demandons tous ce que le Seigneur attend de nous, a répondu le pape. Il me semble que le grand défi de notre temps… soit la sécularisation : c’est-à-dire une manière de vivre et de présenter le monde comme si Dieu n’existait pas… Nous devons rendre Dieu à nouveau présent dans nos sociétés. Cela me semble la première nécessité… Nous devons prendre acte du fait d’être des créatures, constater qu’il existe un Dieu qui nous a créés et que faire sa volonté n’est pas une dépendance mais un don d’amour qui nous fait vivre ».

« Le premier point est donc de connaître Dieu… Le deuxième point présente la question : quel Dieu ?... La deuxième question est donc : reconnaître le Dieu qui nous a montré son visage en Jésus, qui a souffert pour nous, qui nous a aimés jusqu’à la mort et a ainsi vaincu la violence ».

Vittorio, 20 ans, a quant à lui demandé au pape de raconter comment il a décidé de devenir prêtre et de donner des conseils aux jeunes pour discerner l’appel de Dieu.

« J’ai grandi dans un monde très différent du monde actuel, mais en définitive les situations se ressemblent. D’une part il y avait la situation… dans laquelle il était normal d’aller à l’église et d’accepter la foi comme la révélation de Dieu… ; de l’autre, il y avait le régime nazi qui affirmait clairement : ‘Dans la nouvelle Allemagne, il n’y aura plus de prêtres… cherchez vous une autre profession’. Mais précisément en entendant ces voix ‘fortes’, confronté à la brutalité de ce système au visage inhumain, j’ai compris en revanche qu’il y avait un grand besoin de prêtres….Dans cette situation, la vocation au sacerdoce a grandi presque naturellement avec moi, et sans grands événements de conversion. Deux autres choses m’ont aidé sur ce chemin : alors que j’étais enfant… j’ai découvert la beauté de la liturgie… car je sentais qu’elle laissait transparaître la beauté divine… le deuxième élément a été la découverte de la beauté de connaître, de connaître Dieu, les Saintes Ecritures grâce auxquelles il est possible d’entrer dans cette grande aventure du dialogue avec Dieu qu’est la théologie ».

« Bien sûr, les difficultés n’ont pas manqué. Je me demandais si j’avais vraiment la capacité de vivre le célibat toute ma vie. Etant un homme de formation théorique et non pratique, je savais également qu’il ne suffit pas d’aimer la théologie pour être un bon prêtre…Mais le Seigneur m’a aidé et, surtout la compagnie des amis, de bons prêtres et de maîtres ».

« Revenant à la question, je pense qu’il est important d’être attentifs aux gestes du Seigneur sur notre route. Il nous parle à travers les événements, les personnes, les rencontres : il faut être attentifs à tout cela. Puis, deuxième point, entrer vraiment dans une relation d’amitié avec Jésus, dans une relation personnelle avec Lui…dans laquelle nous pouvons commencer à comprendre ce qu’Il nous demande… Cela reste toujours, certes, une grande aventure, mais la vie ne peut réussir que si nous avons le courage de l’aventure, la confiance que le Seigneur ne nous laissera jamais seuls, qu’il nous accompagnera, nous aidera ». 

Giovanni, 17 ans, a enfin demandé au pape d’expliquer quel est le rapport entre science et foi.

« Le grand Galilée a dit que Dieu a écrit le livre de la nature sous forme de langage mathématique. Il était convaincu que Dieu nous avait donné deux livres : celui des Saintes Ecritures et celui de la nature. Et le langage de la nature – il en était convaincu – est la mathématique, il s’agit donc d’un langage de Dieu, du Créateur…. », a expliqué Benoît XVI.

« La structure intellectuelle du sujet humain et la structure objective de la réalité coïncident : la raison subjective et la raison objective dans la nature sont identiques… Il me semble que la mathématique… nous montre la structure intelligente de l’univers… Plus nous réussissons à instrumentaliser le monde avec notre intelligence, plus apparaît le dessein de la Création ».

« A la fin, pour arriver à la question définitive, je dirais : Dieu existe ou il n’existe pas. Il n’y a que deux options. Ou bien on reconnaît la priorité de la raison, de la Raison créatrice… ou bien on soutient la priorité de l’irrationnel… On ne peut en définitive prouver ni l’un ni l’autre projet, mais la grande option du christianisme est l’option pour la rationalité et pour la priorité de la raison. Cela me semble une excellente option, qui montre que derrière tout il existe une grande Intelligence, à laquelle nous pouvons faire confiance ».

« Mais le vrai problème contre la foi aujourd’hui semble être le mal dans le monde : on se demande comment il peut être compatible avec cette rationalité du Créateur. Et ici nous avons vraiment besoin du Dieu qui s’est fait chair et qui nous montre qu’Il n’est pas seulement une raison mathématique mais que cette raison originelle est aussi Amour… Pour cette raison, nous pouvons élaborer avec confiance une philosophie, une vision du monde basée sur cette priorité de la raison, sur cette confiance que la Raison créatrice est amour, et que cet amour est Dieu », a conclu le pape. 


ZF06040703