Sainte Thérèse de Lisieux

 

Sainte Thérèse de l'enfant JésusLa Sainte Vierge a bien fait de garder tout dans son cœur. On ne peut pas m'en vouloir de faire comme elle... Non, la Sainte Vierge ne sera jamais cachée pour moi, car je l'aime trop. ...

Que j'aurais donc bien voulu être prêtre pour prêcher sur la Vierge Marie ! Il me semble qu'une seule fois m'aurait suffi pour faire comprendre ma pensée à son sujet. J'aurais d'abord montré à quel point la vie de la Sainte Vierge est peu connue.

Il ne faudrait pas dire d'elle des choses invraisemblables ou qu'on ne sait pas : par exemple que, toute petite, à trois ans, elle est allée au Temple s'offrir à Dieu avec des sentiments brûlants d'amour et une ferveur extraordinaire, tandis qu'elle y est peut-être allée tout simplement pour obéir à ses parents... Pourquoi dire encore, à propos des paroles prophétiques du vieillard Siméon, que la Sainte Vierge, à partir de ce moment-là, a eu constamment présente à ses yeux la passion de Jésus ?... "Un glaive de douleur transpercera votre âme" (Luc, II, 35). Vous voyez bien, ma petite Mère, que c'était une prédiction pour plus tard... Pour qu'un sermon sur la Sainte Vierge porte du fruit, il faut qu'il montre sa vie réelle, telle que l'Évangile la fait entrevoir, et non pas sa vie supposée ; et l'on devine bien que sa vie réelle, à Nazareth et plus tard, devait être tout ordinaire... "Il leur était soumis" (Luc, II, 51). Comme c'est simple !

On montre la Sainte Vierge inabordable, il faudrait la montrer imitable, pratiquant les vertus cachées, dire qu'elle vivait de foi, comme nous, en donner des preuves tirées de l'Évangile, où nous lisons : "Ils ne comprirent pas ce qu'il leur disait" (Luc, I, 50), ou encore : "Son père et sa mère étaient dans l'admiration des choses qu'on disait de lui" (Luc, II, 33). Cette admiration dénote un certain étonnement, ne trouvez-vous pas, ma Mère ?

On sait bien que la Sainte Vierge est la Reine du ciel et de la terre, mais elle est plus mère que reine, et il ne faudrait pas faire croire (comme je l'ai souvent entendu dire) qu'à cause de ses prérogatives elle éclipse la gloire de tous les saints, comme le soleil, à son lever, fait disparaître les étoiles. Mon Dieu, que cela est étrange ! Une mère qui fait disparaître la gloire de ses enfants ! Moi je pense tout le contraire, je crois qu'elle augmentera de beaucoup la splendeur des élus.

   

Derniers entretiens - 21 août 1897